Deux sorcières vivaient dans un
vieux château, sombre et délabré.
Deux surs qui ne se ressemblaient
pas du tout. L'aînée, Pélagie,
vieille et grognon, était toujours
accompagnée de son horrible Chat
noir. La plus jeune, Amandine, rêvait
de devenir un jour une jolie fée.
Théodore, son ami le perroquet, l'encourageait
en lui racontant des histoires un peu folles.
Pélagie portait la même vilaine
robe noire toute l'année. Amandine,
au contraire, changeait de robe chaque jour.
Elle avait une préférence
pour la robe bleu-ciel et surtout pour les
petits chaussons en velours très
doux qui étaient exactement du même
bleu. Les deux sorcières ne s'occupaient
jamais de rien : elles n'allaient jamais
à Carrefour le samedi pour faire
les courses, elles ne faisaient jamais à
manger, elles ne nettoyaient jamais leur
vieux château plein de toiles d'araignée.
Quand Pélagie avait faim elle faisait
un grand geste plein de colère et
aussitôt apparaissait un énorme
rat cuit à point qu'elle avalait
rapidement. Quand Amandine sentait qu'elle
était trop fatiguée par tous
les tours de magie qu'elle avait faits,
elle posait calmement sa petite main sur
la table. Aussitôt apparaissait un
bon poulet fumant et un grand bol rempli
de graines. Elle mangeait tranquillement
le poulet tandis que son ami Théodore
avalait ses graines. Amandine aimait bien
Théodore ; elle n'oubliait jamais
les graines préférées
du perroquet. Elle donnait tous les restes
du poulet à l'affreux Chat noir qui
ne le méritait pas. Ce chat était
aussi méchant, aussi mauvais que
Pélagie sa maîtresse ; mais
Amandine était si bonne.
Chaque jour, Pélagie et Amandine
faisaient de drôles de concours. "
Tu veux un cafard géant ? "
Demandait Pélagie. " Et hop,
le voilà ! " Amandine détruisait
aussitôt cette affreuse bestiole.
Amandine ouvrait tout grands les bras et
tendait à sa sur une magnifique
gerbe de fleurs fraîches qui répandait
un parfum extraordinaire dans cet humide
château. Pélagie étonnée
se demandait quoi faire d'une chose aussi
inutile et d'un geste détruisait
tout.
En arrivant à l'école un
lundi matin, Sophie, une blondinette de
six ans, nous décrivit le vase de
Chine que sa maman avait reçu pour
son anniversaire. Amandine, ce jour-là,
offrit à sa sur un vase de
Chine aussi grand qu'une armoire. Le chat
et le perroquet tournèrent longtemps
autour du vase puis se battirent avec violence.
On retrouva des morceaux de porcelaine noirs,
rouges ou dorés dans les plus petits
recoins de la salle de garde.
Le jeudi suivant, Julien un petit dur tout
juste âgé de sept ans, magnifiquement
coiffé en brosse décide que
la méchanceté de Pélagie
mérite qu'on lui coupe les cheveux.
Il fait l'unanimité contre lui. Pélagie,
protégée par toute une classe,
conservera sa longue chevelure.
Le jour où le chauffage tombe en
panne et que nous repoussons les tables
pour dégager un espace, Pélagie
et Amandine viennent danser avec nous. Elles
ont si froid dans leur vieux château
plein de courants d'air !
Ainsi, notre vie est étroitement
mêlée à la vie de nos
deux sorcières. Les deux bureaux
sont envahis de textes, de dessins, nous
avons toujours quelque chose de nouveau
à ajouter. Il fait un temps magnifique,
toutes les baies, côté cour,
sont largement ouvertes. La gentille Dame
de Service apporte une note à lire
de suite, elle entrouvre la porte ; aussitôt,
le courant d'air malicieux, provoque un
formidable envol de dessins et de textes.
Nous comprenons enfin qu'il va être
impossible de tout classer, de tout garder.
Heureusement, Brigitte, la Dame de Service,
est là. Elle trie, classe, découpe,
colle. Quel dommage de la voir faire la
baie vitrée du préau, elle
qui sait si bien s'occuper des enfants ;
j'avoue la kidnapper le plus souvent possible,
les enfants l'adorent et moi aussi. Merci
à toi, Brigitte de venir si souvent
participer aux activités de la classe.
Un grand merci à Nicole, notre Directrice,
qui encourage Brigitte, se privant ainsi
d'un couloir rutilant.
Aujourd'hui, Pélagie, Amandine,
Théodore le perroquet, et l'horrible
Chat noir sont réunis dans la grande
salle du château. Pélagie est
la présidente, c'est-à-dire
qu'elle parle sans arrêts, et que
les autres ne peuvent rien dire du tout.
Alors on entend une chose incroyable, une
chose impensable, une chose inouïe
: Amandine crie, Amandine se met en colère,
elle dit qu'elle veut parler, qu'elle a
quelque chose d'important à dire.
Sa sur, surprise n'en revient pas
et du coup, se tait.
Amandine déclare qu'elle est adulte
puisqu'elle est née il y a exactement
deux cents ans. Amandine ajoute qu'elle
n'est plus une petite fille, et qu'elle
ne veut plus obéir aux trois cent
cinquante ans de Pélagie.
Alors il se passe une chose incroyable,
une chose impensable, une chose inouïe
: Pélagie devient triste. Elle qui
ne connaissait que la hargne, que la colère
et que la méchanceté, est
triste. Elle a tellement ri aux éclats,
de voir les gens pleurer, qu'elle ne sait
plus quoi faire. Alors, elle donne un énorme
coup de poing sur la table. Elle ne va pas
avouer sa peine : C'est trop nouveau pour
elle ! Le château résonne,
et l'on entend mille coups de poing. Et
pour la première fois aussi, on voit
une chose incroyable, une chose impensable,
une chose inouïe : le vilain Chat noir
et Théodore le perroquet s'enfuient
ensemble, apeurés par tant de vacarme.
Les jours passent, Pélagie et Amandine
font comme s'il ne s'était rien passé.
Elles reprennent leurs jeux habituels de
sorcières : et voici un cafard, et
je t'offre un bouquet, et voici un violent
orage, et j'allume un bon feu dans la cheminée
pour te réchauffer ; Pélagie
a retrouvé son sale caractère
et son plus grand plaisir est de martyriser
les Humains. Amandine s'efforce de réparer
les dégâts causés par
les méchancetés de sa sur.
On dit tout bas dans ma classe que les inondations
de Nîmes le trois octobre mille neuf
cent quatre vingt-huit ont été
provoquées par Pélagie. On
murmure aussi que chaque année, sa
plus grande joie, au moment des fortes chaleurs,
est de mettre le feu à la garrigue
desséchée. Enfin, Pélagie
est responsable des orages violents qui
s'abattent sur Montpellier en plein hiver.
Pélagie et Amandine ont toujours
vécu dans ce vieux château,
sombre et délabré. Pélagie
se dit qu'il est impensable de vivre ailleurs
: c'est un Vrai Château de Sorcières,
qui grince, qui craque, qui laisse pénétrer
le vent tournant, le vent hurlant. Pour
Pélagie, c'est le Château Idéal.
Ce château est tout de même
habitable. On y voit des fauteuils confortables,
des bancs géants, des tables immenses,
des lits minuscules, et surtout de bons
gros poufs, de bons gros coussins où
l'on est si bien assis. Dans ce vieux château,
il n'y a pas d'armoire, pas de buffet, pas
de placard, il y a seulement des coffres.
Des coffres, il y en a partout ; ça
sert d'armoire, de buffet ou de placard,
il y en a d'immenses, mais plus ils sont
petits plus ils sont intéressants.
Un coffre intéresse particulièrement
Amandine. Ce coffre est un coffre en bois
entouré de larges bandes de métal.
Il a une serrure très compliquée,
une serrure à secrets. Ce coffre
est posé par terre au beau milieu
de la chambre de Pélagie. Jamais,
la jeune sorcière n'a pu pénétrer
dans la chambre de sa sur. Elle n'a
pas assez de pouvoirs ; une barrière
invisible et infranchissable empêche
de poser la main sur la poignée de
la porte. Amandine ne peut ni entrer dans
la chambre, ni ouvrir le coffre magique
dont elle ne possède pas la clef.
Amandine ne se décourage pas. Elle
veut partir du château trop froid
et trop triste à son goût.
Elle veut ouvrir le Coffre, y prendre la
Clef d'Or qui repose là depuis au
moins mille ans. Elle veut devenir une belle
et bonne fée. Elle veut partir très
loin, vers le Château Du Bonheur,
ne jamais revenir au Château Des Sorcières.
Le jour où elle aura enfin la Clef
Magique elle pourra ouvrir toute grande
la porte du Château du Bonheur. Elle
essaye donc plusieurs fois sans y parvenir.
Pélagie sait très bien ce
que complote sa petite sur avec l'aide
de Théodore, le perroquet. Le vilain
Chat noir, d'ailleurs, les espionne continuellement.
Elle sait qu'Amandine désire lui
voler l'énorme trousseau de clefs
qu'elle garde toujours sur elle.
Ce matin, Amandine, la jeune sorcière,
se lève avant le jour. Le ciel a
des reflets blanchâtres, le soleil
n'est pas encore apparu sur la colline et
le sinistre Château reste dans l'ombre.
Amandine s'agite et met sa chambre en désordre.
Elle cherche, elle fouille et enfin elle
trouve ce qu'elle désire. Elle découpe
un grand morceau de tissu blanc. Elle s'enveloppe
dedans et personne ne peut la reconnaître
: on croirait voir le Grand Fantôme
Blanc. Mais le Chat noir, curieux et levé
depuis longtemps, la regarde se déguiser,
et court réveiller la Vieille Sorcière.
Il la secoue, il la bouscule, il lui raconte
tout. Quand Amandine apparaît ainsi
vêtue, Pélagie n'a pas peur
du tout. Amandine vient d'échouer
pour la première fois...
Un mois passe. Amandine et Pélagie
reprennent leurs jeux ; mais Amandine écoute
les clefs cliqueter dans les jupes de sa
sur. Elle ne pense plus qu'à
cela. Il faut qu'elle ouvre le Coffre de
bois cerclé de métal, qu'elle
prenne la Clef d'Or, qu'elle se sauve vers
le Château du Bonheur.
Le soleil est couché depuis longtemps
déjà. Ce soir, Amandine fait
bien attention que le vilain Chat noir ne
la suive pas. Elle dit : " bonsoir
je vais me coucher ", et monte dans
sa chambre. Elle y met un grand désordre.
Elle cherche, elle fouille et enfin elle
trouve ce qu'elle désire. Elle découpe
un grand tissu noir et se cache entièrement
dedans. Elle descend le sombre escalier,
pénètre dans la grande salle
obscure, et s'approche de sa sur sans
rien dire. Pélagie recule effrayée
: elle croit voir Le Grand Fantôme
Noir. Amandine pense alors qu'elle a gagné.
Hélas, à ce moment précis,
Théodore, le perroquet, vient se
poser sur l'épaule de la Jeune Sorcière.
Aussitôt, Pélagie reconnaît
la pauvre Amandine désespérée.
Amandine vient d'échouer pour la
seconde fois...
La Jeune Sorcière ne se déguisera
plus. Elle cherche une autre idée.
Un après-midi où les deux
sorcières jouent ensemble, Amandine
lance de la poudre sur Pélagie. La
vieille sorcière aveuglée
se met à hurler, se jette par terre
et s'y roule. Aussitôt, la Jeune Sorcière
lui saute dessus et essaie de fouiller dans
les nombreuses poches de la robe noire.
Pélagie se tourne et se retourne
dans tous les sens et la pauvre Amandine
ne peut jamais enfiler une main dans tous
ces plis. Pélagie se redresse avec
force, part à tâtons et se
lave les yeux. Cet après-midi-là,
la pauvre Amandine a échoué
pour la troisième fois... Dorénavant,
Pélagie surveille attentivement la
jeune fille qui pleure beaucoup. La Jeune
Sorcière essaie tout ce qui est possible.
Un soir d'automne, où il fait plus
froid et plus gris qu'à l'ordinaire,
la Jeune Sorcière se transforme en
un énorme Monstre à trois
pattes. Il est bien joli, ce Monstre à
trois pattes, vert et rose. Il a une sorte
d'arête noire sur le dos, une arête
très amusante vraiment. Hélas
! Pour Amandine, le Monstre à trois
pattes est un monstre souriant. Le Chat
noir en a très peur. Mais, Pélagie
reconnaît immédiatement sa
petite sur dans ce monstre-là,
à cause du sourire. C'est la quatrième
fois qu'Amandine échoue.
Vers Noël, Amandine se transforme
en Dragon vert, crachant du feu. La Vieille
Sorcière a d'abord très peur.
Mais le Dragon vert se met à parler.
C'est une énorme erreur ! Le gigantesque
Dragon vert dit d'une voix douce : "
Je veux la Clef du Coffre Magique ! ".
Alors Pélagie, la Vieille Sorcière
éclate de rire, et Amandine, redevenue
elle-même pleure : Et de cinq se dit-elle...
Au printemps suivant, apparaît dans
les prés fleuris un Grand Dragon
Marron. Il est énorme, il crache
du feu. C'est un vrai dragon tout à
fait effrayant. Cette fois-ci, Pélagie
a vraiment très peur et se transporte
par magie à l'intérieur du
Château. Elle colle alors son grand
nez pointu sur une petite ouverture et regarde
attentivement le Grand Dragon Marron qui
se déplace dans la prairie. Elle
est stupéfaite par ce qu'elle voit
: le Grand Dragon Marron avance lentement,
calmement, soulève une lourde patte
puis une autre et les repose en prenant
bien soin de n'écraser aucune fleur.
A ce signe, Pélagie reconnaît
Amandine. La Vieille Sorcière éclate
d'un rire énorme qui secoue tout
le Château. Amandine désespérée
s'enfuit dans sa chambre et pleure toute
la nuit. Pour la sixième fois, elle
vient d'échouer...
Alors Pélagie se met à surveiller
sa sur jour et nuit. Un après-midi,
Amandine semble très occuper à
embellir le Château : et je décore
les murs de belles tapisseries, et je glisse
des tapis moelleux sur le carrelage humide,
et je mets des vases chargés de fleurs.
Bref, Amandine s'amuse follement. Pélagie,
fatiguée et sans méfiance,
s'endort profondément dans son fauteuil
près de la cheminée. Amandine
regarde sa sur, attend un peu, et
transforme la Vieille Sorcière en
Souris. Alors, le vilain Chat noir saute
sur la Souris endormie pour la dévorer.
Pélagie se réveille en sursauts
et instantanément une Sorcière
laide et méchante réapparaît.
Mais, être méchant quand on
a failli être dévoré
tout cru, c'est normal, non ? Et de sept,
se dit la Jeune Sorcière. Les jours
passent, Amandine devient de plus en plus
triste. Elle ne s'amuse plus et ne parle
presque plus. Théodore essaie de
la distraire. Il s'envole dans tous les
recoins du Château. Un jour, en se
perchant sur le rebord de la fenêtre
de la chambre de Pélagie il s'aperçoit
que le Coffre n'y est plus. Il se précipite
vers Amandine pour lui raconter sa découverte.
Amandine recommence à sourire et
à courir dans toutes les salles.
Chaque jour elle explore une nouvelle pièce,
une nouvelle cave, un nouveau grenier. Elle
ne trouve pas le Coffre magique.
Agacée, énervée, la
très douce Amandine remplit un grand
seau d'eau et le jette sur Pélagie
ahurie. Amandine demande de l'excuser. Elle
aide gentiment sa grande sur à
changer de vêtements. Elle fait un
paquet des vêtements mouillés
et dit qu'elle va les laver à la
rivière comme elle a vu les jeunes
filles du village le faire. Que Pélagie
ne s'inquiète de rien ! Elle étendra
les vêtements sur la prairie pour
les faire sécher ! . Amandine fouille
dans les nombreuses poches. Elle trouve
enfin la Clef du Coffre en bois cerclé
de métal. Mais maintenant qu'elle
a la Clef, elle ne sait pas où le
Coffre est caché. C'est désespérant.
Pélagie arrive, tend la main sans
rien dire, et Amandine rend la Clef du Coffre.
Elle vient d'échouer pour la huitième
fois...
Amandine surveille Pélagie qui surveille
Théodore qui surveille le Chat noir
qui surveille Amandine... Amandine s'aperçoit
que sa grande sur la laisse seule
très souvent dans la journée.
Théodore lui apprend que Pélagie
s'enferme dans la plus haute tour, là-haut,
sous le toit d'ardoise. Un soir où
Pélagie somnole en regardant les
flammes danser dans la vaste cheminée,
la Jeune Sorcière a une idée
extraordinaire. Elle grimpe jusqu'au donjon.
Elle devient d'abord invisible. Puis, pour
ne pas faire grincer la porte en l'ouvrant,
elle diminue sa taille, s'aplatit, se glisse
comme une feuille de parchemin entre le
sol et le dessous de la porte. Elle se retrouve,
enfin, face au Coffre. Hélas ! Elle
n'en a pas la Clef. Alors, elle devient
Clef du Coffre ! Une drôle de clef,
une clef qui a des pieds et des mains, une
clef qui grimpe seule jusqu'à la
serrure et qui essaie de la faire tourner.
Au cours de la nuit, Amandine prend toutes
les formes de clef qu'elle peut imaginer.
Aucune de ces clefs ne réussit à
ouvrir le Coffre Magique. Quand le soleil
se lève, elle se sauve, se jette
sur son lit et dort jusqu'au soir. Pélagie
inquiète vient plusieurs fois la
regarder. Les bonnes joues roses de sa jeune
sur la rassurent. Cette gamine de
deux cents ans joue trop, elle s'épuise,
pense Pélagie et elle la laisse dormir.
C'est la neuvième fois qu'Amandine
échoue...
Enfin, vers la fin de l'été,
Pélagie, la Vieille Sorcière,
grimpe jusqu'au sommet de la tour. Elle
s'enferme, mais elle oublie de faire le
Grand Geste Magique, celui qui met les barrières
invisibles et infranchissables, celui qui
empêche de poser la main sur la porte.
C'est une monstrueuse erreur... Elle ouvre
le Coffre Magique, en sort la Clef d'Or
qui brille sous les rayons du soleil levant.
La Jeune Sorcière grimpe avec souplesse
l'étroit escalier qui monte jusqu'au
sommet de la tour. Tout en grimpant, Amandine
devient la Sorcière la plus laide,
la plus affreuse que le monde n'eut jamais
vue. Elle entre, terrible, féroce,
muette, et s'avance lentement sur la pauvre
Vieille Sorcière terrifiée.
Pélagie a tellement peur qu'elle
laisse le Coffre Magique grand ouvert. Elle
lâche la Clef d'Or. La terrible Sorcière
se précipite, ramasse la Clef d'Or,
et se sauve. Quand Pélagie comprend
que sa petite sur vient de partir,
emportant La Clef Du Bonheur, il est trop
tard... Amandine a réussi. ELLE A
CONQUIT LA CLEF DU BONHEUR.
CONCLUSION
" J'ai la Clef d'Or, j'ai la petite
CLEF d'Or " se répète
Amandine, et elle laisse éclater
sa joie. Elle serre très fort Théodore,
son Perroquet, elle l'embrasse, elle l'étouffe.
Sa première idée est de se
transporter instantanément, par magie,
devant le Château du Bonheur. Puis
elle réfléchit et se dit :
" Le Bonheur, ça se gagne !
". Elle décide donc de faire
tout ce long chemin à pieds comme
les Humains. Elle marche des jours et des
jours. Elle se repose dans la forêt.
Elle boit de l'eau de source. Cependant,
chaque midi, elle ne résiste pas
et pose calmement sa petite main bien à
plat sur l'herbe. Aussitôt apparaît
un bon poulet fumant et un grand bol rempli
de graines. Puis Amandine continue son chemin
jusqu'au soir, elle, toujours marchant,
Théodore toujours volant. Cela dure
depuis des jours et des jours.
Enfin, à l'époque des vendanges,
ils arrivent en vue du Château du
Bonheur. Tous les Humains travaillent beaucoup.
Amandine les observe et est très
étonnée. Il y a des charrettes,
des tracteurs et des remorques. Il y a des
" Coupeurs " qui coupent les grappes
de raisin, il y a des " Porteurs "
qui emportent de lourds paniers d'osier
chargés de raisin jusqu'aux remorques
tout au bout du champ. Amandine est émerveillée
de voir tout cela et se précipite
vers les Humains. Mais eux, qui travaillent
si vite et si fort depuis l'aube, regardent
avec mépris cette drôle de
Jeune Fille, vêtue d'une longue robe
bleu-ciel et qui s'avance dans la boue avec
des petits chaussons en velours bleu très
doux. Elle part tristement. Soudain, la
magnifique Porte du Château du Bonheur
brille sous la tiède et calme lumière
matinale. Amandine oublie tout à
fait les Humains. Elle ne se maîtrise
pas ; elle hurle sa joie, elle saute si
haut qu'elle en perd un de ses chaussons,
elle fait des pirouettes, elle danse, à
nouveau, elle étouffe ce pauvre Théodore.
Mais, dans cette joie folle, elle ne lâche
jamais la petite Clef d'Or. D'ailleurs,
pendant toute la durée du voyage,
elle a serré si fort cette clef-là,
que sa petite main gauche en est imprimée.
Maintenant, tenant la Clef d'Or dans la
main droite, elle s'apprête à
L'introduire dans la Serrure Magique.
Brusquement un violent orage éclate.
Des trombes d'eau envahissent les vignobles,
trempent les vendangeurs, fauchent les grappes
de raisins, embourbent charrettes et tracteurs,
inondent et coupent les routes. Les vendangeurs
doivent s'enfuir à pieds, abandonnant
tout sur place. Pélagie, laide, vieille
et grognon, toujours accompagnée
de son horrible Chat noir, vient d'arriver
devant le Château du Bonheur.
Pourtant, Pélagie a changé.
Ce matin même, elle avait fait une
chose incroyable, une chose impensable,
une chose inouïe. Pensez ! Elle avait
abandonné le Vieux Château,
sombre et délabré ! .Elle
avait abandonné Le Vrai Château
Des Sorcières, qui grince, qui craque,
qui laisse pénétrer le vent
tournant, le vent hurlant ! Parce que Ce
N'était Plus le Château Idéal,
puisque Amandine, sa petite sur était
partie ! Pélagie venait de redécouvrir
un sentiment étrange, un sentiment
qu'elle avait déjà éprouvé
le jour des deux cents ans de la Jeune Sorcière.
Enfin, Pélagie se rend compte qu'elle
est triste, qu'elle a de la peine. Ce sentiment
trop nouveau l'effraie. Elle découvre
qu'Amandine lui manque, qu'elle aime Amandine,
qu'elle ne peut rester éloignée
de sa petite sur. Alors, elle abandonne
sa hargne, sa colère et sa méchanceté
dans le Château des Sorcières.
Mais, arrivée au-dessus des vendangeurs,
elle ne peut s'empêcher, une dernière
fois de laisser éclater son sale
caractère.
Amandine est effrayée de voir sa
sur. Immédiatement, elle pense
que Pélagie est venue lui reprendre
la Clef d'Or. Elle réagit aussitôt
et introduit la Clef d'Or dans la Serrure
Magique. La Porte Magique s'ouvre toute
grande. Amandine pénètre la
première dans le Château du
Bonheur. Elle devient instantanément
la Jeune Fée, bonne et jolie qu'elle
souhaitait être depuis si longtemps...
Alors, Théodore le perroquet, s'envole
et passe sous le porche : il devient instantanément
un Jeune Prince Charmant. Théodore
avait toujours aimé Amandine. Et
cette fois, c'est lui qui l'étouffe
en la serrant dans ses bras...
Le Vilain Chat Noir, curieux, s'avance.
Aussitôt qu'il se trouve dans la cour
intérieure du Château, il disparaît
totalement. On voit alors un Vieux Roi,
charmant, qui retourne vers la Porte d'Entrée
du Bonheur. Il va chercher Pélagie,
la Vieille Méchante Sorcière
restée à l'extérieur
du Château. Il la salue respectueusement,
lui tend la main, et l'aide à pénétrer
sous les voûtes du Porche. Pélagie
devient instantanément une sympathique
Vieille Fée qui regarde avec tendresse
ce Vieux Roi si charmant. Alors, elle décide
de l'épouser immédiatement
et ne lui demande même pas son avis.
Mais cela fait bien rire ce bon Vieux Roi
si charmant, parce que c'est exactement
ce qu'il souhaite...
Amandine et Théodore qui se regardent
et qui se sourient ne voient même
pas les deux charmants petits vieux qui
se tiennent par la main juste à côté
d'eux. Pélagie, toujours énergique,
se plante alors devant Amandine et Théodore
et dit avec autorité " Je vous
déclare mariés ".
Amandine et Théodore se sont mariés
il y a huit ans déjà. Ils
vivent heureux entourés de leurs
vingt-six enfants, tous nés dans
ce merveilleux Château du Bonheur.
Le Coffre magique est resté dans
le Château des Sorcières. Amandine
porte à son cou La Petite Clef d'Or,
suspendue à une jolie chaîne.
La Petite Clef d'Or ne servira plus jamais
: La Serrure Magique ne peut fonctionner
qu'une seule fois. La magnifique Porte Magique
restée grande ouverte, permet à
tous, s'ils le souhaitent, de venir se réfugier
dans le Château du Bonheur.
Nous sommes tous les enfants de Théodore
et d'Amandine : Nous sommes gentils , jolis,
intelligents et doux comme nos Parents.
Et s'il nous arrive d'être grognons,
hargneux, coléreux, Tante Pélagie
intervient, autoritaire. Je vous interdis,
de ressembler à votre Tante !!! Venez
tous vous asseoir autour de moi ! Je vais
vous raconter une merveilleuse histoire...
Et elle recommence pour la dixième
fois au moins : Deux Sorcières vivaient
dans un vieux Château... On la connaît
par cur son histoire, mais on n'a
pas intérêt à bouger.
Tante Pélagie, pour avoir le calme,
serait capable de nous transformer en statues...
Nous sommes douze filles : Amel - Anessa
- Audrey - Cécile - deux Christelle
- Emilie - Najlaa - deux Patricia - Stéphanie
- Sylvie. Nous sommes quatorze garçons
: Brice - Cédric - David - Fabrice
- Gautier - Grégory - Guillaume -
Halim - Jean - Jérôme - Joseph
- Nicolas - Nima - Yoram.
Mais, Personne n'ose bouger sous le regard
de Tante Pélagie. |