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Dominique Prévot

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28 XII 2015

L'Héritage dissonant - © Dominique PRÉVOT
 

Nouvelle Publiée Mai 2002 dans
"Les Cahiers de l'Escarboucle Bleue n°1"
édités par CERCLE LITTÉRAIRE DE L'ESCARBOUCLE BLEUE

 
Le Registre d'Ecrou...

Nouvelle publiée en 2000 dans
"Le Registre d'Ecrou" n°3,
bulletin de la Société Strasbourgeoise d'Études Holmésiennes
"Les évadés de Dartmoor".

Les évadés de Dartmoor...
Chapitre 1
Le premier printemps du siècle n’avait pas été clément à Londres. Accompagnant les pousses des premières feuilles, fraîches et vertes, la pluie n’avait de cesse de tomber. Les rares passants se hâtaient, transis, et même les vendeurs de journaux semblaient avoir abandonnés les rues. Cela durait maintenant depuis une quinzaine de jours.
Bien qu’il soit près de onze heures, il faisait presque noir. J’en fis la remarque à Holmes, qui me répondit d’un grognement. Il était vautré dans un fauteuil, enveloppé dans sa robe de chambre grise, les jambes allongées, tirant machinalement sur sa pipe, semblant contempler le plafond, et y voyant probablement je ne sais quelle réponse à je ne sais quelle question qui pouvait bien hanter son esprit. Les premiers jours de pluie, immobilisé à Baker Street par la force des choses, mon ami s’était attelé à ranger les journaux que nous avions reçus. Ce début de siècle avait été fertile en affaires, et nous avait laissé peu de temps disponible. De plus, je pense l’avoir fait remarquer à plusieurs occasions, Holmes n’était pas un maniaque du rangement, quelles que soient ses autres qualités, par ailleurs indéniables. C’est donc avec un plaisir non dissimulé que j’observais mon ami feuilleter les anciens journaux, en jeter certains, découper des articles dans d’autres, et dont lui seul pouvait imaginer l’intérêt. Il les classait ensuite dans ses dossiers alphabétiques.
Après avoir épuisé les journaux, dont Mrs Hudson se demandait comment elle pourrait bien faire pour s’en débarrasser à son tour, Holmes s’était lancé dans quelques études sur sa paillasse. Il empestait régulièrement la pièce, et j’ouvrais alors la fenêtre, préférant la pluie à l’asphyxie. J’adressais quelques remarques à mon ami, concernant ce qu’il convient de faire dans un appartement et ce qui requiert un espace approprié, comme un laboratoire, bien qu’en pure perte. Mais depuis quelques jours, il avait cessé cette activité singulière, et ne bougeait pratiquement plus de son fauteuil, même pour manger.
J’en avais profité pour reprendre mes notes des dernières affaires qui s’étaient présentées. Certaines restaient banales, même si mon ami y usait de ses capacités uniques avec brio, mais d’autres ne manquaient pas de surprendre comme l’effarante découverte de Miss Greenwich, l’histoire du duel savant entre deux professeurs, ou encore l’affaire de la position du fou du roi laissée par un joueur d’échecs dont son adversaire ne s’était pas aperçu qu’il était mort.
Mais aujourd’hui, Holmes était entré dans l’une de ses périodes d’inactivité et de mélancolie que je lui connaissais naguère. Cela n’était pas sans m’inquiéter. Je parvenais rarement à lui tirer plus d’un grognement, et encore, sans que je sache s’il signifiait l’approbation ou la négation.
Je quittai la fenêtre pour m’installer dans mon fauteuil près de la cheminée, et feuilletai le Times à la recherche de quelques nouvelles à sensation qui pourraient intéresser mon ami. Malheureusement, il semblait que même les voleurs et autres criminels cherchaient à échapper à la pluie en restant chez eux. Je ne déchiffrai rien de singulier non plus à la page des petites annonces dont Holmes était si friand. Je recherchai à la page des spectacles un prétexte pour tirer Holmes de Baker Street, mais à l’exception d’un concert des œuvres parmi les plus connues de Strauss, interprétées par un orchestre venu spécialement de Vienne, rien ne retint mon attention. Et je doutai qu'une soirée de valses viennoises puisse recueillir l’assentiment de mon ami. Bien que mélomane, il dédaignait ce qu’il appelait la musique facile. Avec un soupir, je repoussai le journal, et entrepris de travailler sur mes notes, suspendant ma tâche à chaque fois qu’un fiacre passait à proximité, en souhaitant que l’un d’eux s’arrêtât devant le 221b.
- Vous avez raison, Watson. Une nouvelle affaire nous ferait le plus grand bien à tous deux. Il est vrai que le temps fait de la capitale de l’empire une ville des plus calme ! En tout cas, ne comptez pas sur moi pour assister à un spectacle de musique aussi frivole que celle de Strauss !

- Les valses de Vienne méritent l’accueil qui leur est fait, rétorquais-je. Mais... Holmes ! Je n’ai rien dit de tout cela !

- Ah, Watson ! On lit en vous comme dans un livre ouvert. Et puis, je n’ai aucun mérite : j’ai lu le Times avant vous ce matin.

- Mais aucune de mes pensées ne figurent dans ce numéro du Times, je vous l’assure !

- Soit, laissez moi vous expliquer. Vous étiez à la fenêtre, scrutant la rue comme si vous attendiez quelqu’un. Je savais que ce n’était pas le cas, car vous m’en auriez averti. Vos regards répétés dans ma direction m’ont indiqué que vous espériez un client. Puis, vous avez regardé les boîtes où je collationne les articles dignes d’intérêt, et enfin, la paillasse. Il était évident que vous pensiez à ces derniers jours, n’est-ce pas ?

- Certes. Mais... et Strauss ?

- Je vous l’ai dit : j’ai lu le journal avant vous ce matin. Aux pages que je consulte avec attention, vous n’avez rien trouvé digne d’être relevé. Moi non plus d’ailleurs. Votre moue dédaigneuse et un coup d’œil que vous avez jeté vers la fenêtre indiquaient tout le mal que vous pensiez de ces gens qui, comme nous le faisons pourtant, restent chez eux au lieu de nous soumettre une affaire remarquable. Puis, vous avez cherché un spectacle, et vous êtes tombé sur le seul article d’intérêt. Votre regard vers mon étui à violon m’a confirmé que vous pensiez à la musique. Tout de suite après, vous aviez la certitude que ce spectacle ne m’enthousiasmerait pas, d’où votre soupir. Tout cela est élémentaire. Je vous remercie de votre sollicitude mon cher ami, mais je vais fort bien. C’est-à-dire aussi bien qu’il soit possible... Ah, mais Watson ! Je pense que vous allez être soulagé : voici un fiacre qui s’arrête. Les affaires reprennent !

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Dominique Prévot
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